Délai de convocation à un entretien préalable au licenciement

Résumé : Je souhaite convoquer un salarié à un entretien préalable au licenciement. Quel délai dois-je prévoir entre l’envoi de la lettre recommandée de convocation et cet entretien ?

Vous devez convoquer votre salarié au moins 5 jours ouvrables avant la date de l’entretien.

Ce délai commence à courir le lendemain de la première présentation de la lettre recommandée au salarié. Il convient donc de tenir compte des délais postaux entre l’envoi de la lettre et sa présentation au salarié. Un délai qui, selon La Poste, est de 3 jours ouvrables. Sachant que les jours ouvrables sont tous les jours de la semaine, à l’exception des dimanches et des jours fériés.

Exemple :
si vous postez la lettre de convocation à l’entretien préalable le jeudi 2 octobre et qu’elle est présentée pour la première fois au salarié le mardi 7 octobre, le délai débute le mercredi 8 octobre et se termine le lundi 13 octobre (sans compter les dimanches). Vous pouvez donc fixer la date de l’entretien à compter du mardi 14 octobre.

De la rupture amoureuse à la rupture du contrat de travail

Résumé : Un fait tiré de la vie personnelle d’un salarié peut justifier son licenciement disciplinaire s’il constitue un manquement à son obligation de santé et de sécurité envers ses collaborateurs.

Les faits tirés de la vie personnelle des salariés ne peuvent pas constituer une faute professionnelle susceptible d’être sanctionnée par leur employeur. Sauf si ces faits révèlent un manquement à une obligation découlant de leur contrat de travail (obligation de loyauté, de sécurité…), comme l’illustre une récente décision de la Cour de cassation.

Un salarié nommé en tant que directeur des partenariats et des relations institutionnelles avait, en dehors de son temps de travail, noué une relation amoureuse avec une autre salariée de l’association. Manifestement éconduit, il avait, cette fois, sur son lieu et son temps de travail, « encombré » le téléphone et la messagerie professionnelle de la salariée afin d’obtenir une explication sur l’échec de leur relation amoureuse. Et il n’avait pas hésité à se montrer insistant, voire menaçant en faisant valoir sa position hiérarchique, malgré le souhait clairement formulé par la salariée de s’en tenir à une relation strictement professionnelle. Cette dernière avait alors alerté le médecin du travail ainsi que le service des ressources humaines de la souffrance au travail dont elle était victime en raison de cette situation. Le directeur avait alors été licencié pour faute grave.

Une obligation de santé et de sécurité !

Mais le salarié avait contesté son licenciement en justice estimant qu’un fait tiré de sa vie personnelle, à savoir son insistance à obtenir une explication quant à la fin de sa relation amoureuse, ne pouvait pas donner lieu à une sanction disciplinaire.

Mais pour la Cour de cassation, le directeur avait, en raison de son insistance, porté atteinte à la santé psychique de la salariée. Il avait donc manqué à son obligation de santé et de sécurité à l’égard de sa collaboratrice, une obligation découlant de son contrat de travail. Et ce manquement justifiait donc bien son licenciement pour faute grave.

Cassation sociale, 26 mars 2025, n° 23-17544

Renonciation du conjoint commun en biens d’un associé à la qualité d’associé

Résumé : Lorsqu’une personne mariée sous le régime de la communauté a apporté des biens communs à une SARL ou à une société civile, son conjoint a le droit de revendiquer lui-même la qualité d’associé ou de renoncer à cette qualité. Sa renonciation peut être tacite mais à condition d’être sans équivoque.

Dans les SARL, dans les sociétés en nom collectif et dans les sociétés civiles, le conjoint d’un associé qui a utilisé des biens communs du couple pour faire un apport à la société ou pour souscrire des parts sociales a le droit de revendiquer lui-même la qualité d’associé pour la moitié des parts sociales correspondantes.

En pratique :
pour exercer ce droit, le conjoint, après en avoir été averti, doit notifier à la société son intention d’être personnellement associé.

Bien entendu, le conjoint peut renoncer à revendiquer cette qualité. Cette renonciation peut être expressément exprimée ou même être tacite. Mais attention, dans ce dernier cas, elle doit résulter d’un comportement sans équivoque.

Une renonciation sans équivoque

Ainsi, dans une affaire récente, un époux marié sous le régime de la communauté avait notifié à la SARL dont son épouse était associée gérante son intention d’être lui-même associé à hauteur de la moitié des parts sociales correspondant à l’apport que cette dernière avait réalisé dans la société. Par la suite, dans le cadre d’un conflit opposant les deux conjoints, l’époux avait agi en justice pour faire constater sa qualité d’associé tandis que l’épouse s’y était opposée, faisant valoir qu’il avait tacitement renoncé à la qualité d’associé.

Après avoir rappelé qu’un époux peut renoncer à la qualité d’associé de manière tacite à condition que cette renonciation soit sans équivoque, les juges ont estimé que l’époux n’avait pas renoncé à la qualité d’associé. En effet, pour eux, le fait que les époux aient constitué, concomitamment, deux sociétés distinctes dont chacun d’eux était associé à hauteur de 50 % sans que l’autre conjoint détienne des parts sociales ou participe à la gouvernance de la société constituée par son conjoint n’était pas suffisant pour démontrer une renonciation sans équivoque à la qualité d’associé de chacun des époux au sein de la société constituée par l’autre.

Cassation commerciale, 12 mars 2025, n° 23-22372

Assurance des dirigeants associatifs

Résumé : Je viens de prendre la présidence d’une association et je voudrais savoir s’il est possible de m’assurer à ce titre. Pourriez-vous me renseigner à ce sujet ?

Sachez d’abord que la responsabilité civile des dirigeants (président, trésorier, secrétaire, membres du conseil d’administration…) agissant dans le cadre de leur mandat associatif est couverte par l’assurance responsabilité civile qui a pu être souscrite par votre association (une assurance qui n’est pas obligatoire, sauf exceptions). Cette assurance prendra ainsi à sa charge les éventuels dommages (matériels, corporels…) causés à un de ses membres ou à un tiers.

En complément, votre association peut contracter une assurance qui va protéger le patrimoine personnel de ses dirigeants. Cette assurance couvre notamment leur responsabilité financière qui peut être engagée lorsque les juges estiment qu’ils ont commis une faute de gestion ayant contribué à l’insuffisance d’actif de l’association et à sa liquidation judiciaire. Les dirigeants étant alors contraints de payer certaines dettes (auprès de l’Urssaf, du Trésor public, des fournisseurs…) sur leur patrimoine personnel.

Enfin, la responsabilité pénale et la responsabilité fiscale des dirigeants associatifs ne peuvent jamais être assurées. Ainsi, aucune assurance ne prend en charge :
– les amendes auxquelles sont condamnés les dirigeants associatifs en raison d’une infraction commise dans le cadre de leurs fonctions (absence de déclaration d’une modification des statuts, défaut d’établissement ou de publication des comptes annuels, harcèlement moral, détournement de fonds, homicide involontaire…) ;
– la condamnation des dirigeants à payer sur leur patrimoine personnel les dettes fiscales de l’association lorsqu’ils ont commis des manœuvres frauduleuses ou des inobservations graves et répétées d’obligations fiscales ayant rendu impossible le recouvrement des impôts dus par l’association.

Licenciement sans délégation de pouvoir dans une association

Résumé : Le licenciement d’une salariée enceinte prononcé par le directeur d’une association ne disposant pas d’une délégation de pouvoirs est un licenciement nul.

Dans les associations, le pouvoir de licencier appartient à l’organe désigné dans les statuts ou, si ces textes sont silencieux sur ce point, au président. L’organe disposant de cette compétence pouvant la déléguer à un salarié de l’association (DRH, directeur…).

Le licenciement prononcé par une personne ne disposant pas de ce pouvoir est, en principe, dépourvu de cause réelle et sérieuse. Mais la Cour de cassation vient de décider que ce licenciement est nul si le Code du travail prévoit une telle sanction, par exemple en cas de licenciement d’une femme enceinte.

À noter :
sauf exceptions, il est interdit de licencier une salariée en état de grossesse médicalement constaté, pendant l’intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit au titre du congé de maternité, pendant les congés payés pris immédiatement après ce congé ainsi que pendant les 10 semaines suivant l’expiration de ces périodes.

Un licenciement sans délégation de pouvoir…

Dans une affaire récente, le directeur d’une association avait licencié pour faute grave une salariée enceinte. Un licenciement contesté en justice au motif que le directeur n’était pas compétent pour prendre cette décision.

La Cour de cassation a constaté d’une part, que, dans cette association, le pouvoir de licencier appartenait, selon les statuts, au conseil d’administration et que d’autre part, le directeur, qui avait signé la lettre de licenciement de la salariée, n’avait reçu aucune délégation de ce pouvoir. En conséquence, ce licenciement, prononcé par une personne incompétente, n’était pas valable.

… déclaré nul par les juges

Il restait alors aux juges à déterminer si ce licenciement devait être déclaré sans cause réelle et sérieuse ou nul.

La Cour de cassation a rappelé que, selon le Code du travail, il est interdit de licencier une femme enceinte, sauf faute grave non liée à son état de grossesse ou impossibilité de maintenir son contrat de travail pour un motif étranger à la grossesse. Le licenciement prononcé en méconnaissance de ces règles étant nul.

S’appuyant sur ce principe, elle a considéré que le licenciement de la salariée enceinte, prononcé par une personne incompétente, devait être déclaré nul. Peu importe qu’il repose ou non sur une faute grave.

Conséquence :
la salariée dont le licenciement est déclaré nul a droit, en l’absence de réintégration, à une indemnité au moins égale à 6 mois de salaire, en plus du paiement des salaires qu’elle aurait perçus entre la date de son licenciement et la date de fin de la période de protection contre le licenciement.

Cassation sociale, 12 février 2025, n° 23-22310

Le cadre dirigeant doit participer à la direction de l’entreprise

Résumé : Seuls les cadres effectivement habilités à prendre des décisions de façon largement autonome, les amenant à participer à la direction de l’entreprise, peuvent être qualifiés de cadre dirigeant.

Selon le Code du travail, le cadre dirigeant est un salarié auquel sont confiées des responsabilités dont l’importance implique une grande indépendance dans l’organisation de son emploi du temps, qui est habilité à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoit une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans l’entreprise. Ces trois conditions étant cumulatives.

Rappel :
les cadres dirigeants ne sont pas soumis aux règles du Code du travail relatives à la durée du travail, au repos quotidien et hebdomadaire, aux jours fériés et à la journée de solidarité.

Pas de cadre dirigeant sans participation à la direction de l’entreprise

Dans une affaire récente, un directeur des achats avait, à la suite de son licenciement, saisi la justice afin notamment d’obtenir le paiement d’heures supplémentaires.

Les juges de la cour d’appel avaient rejeté cette demande au motif que le salarié était un cadre dirigeant. Pour en arriver à cette conclusion, et après avoir noté que son contrat de travail lui attribuait cette qualité, ils avaient constaté que le salarié :
– exerçait les fonctions de directeur achats avec la classification conventionnelle la plus élevée ;
– bénéficiait de pouvoirs étendus, faisait partie de l’organigramme de direction et avait été nommé membre du « Management Circle » et de l’« Executive Management Circle », ce dernier regroupant exclusivement des cadres dirigeants et mandataires sociaux lors de réunions mensuelles stratégiques ;
– occupait un véritable rôle clé dans l’organisation et le développement à venir du groupe.

Cet arrêt de la cour d’appel a été censuré par la Cour de cassation. En effet, pour celle-ci, les éléments mis en avant par la cour d’appel ne suffisaient pas à établir que le salarié était, dans l’exercice de ses fonctions, effectivement habilité à prendre des décisions de façon largement autonome, l’amenant à participer à la direction de l’entreprise. Cette affaire sera donc rejugée par une autre cour d’appel.

À noter :
il appartenait à l’employeur qui soutenait que son salarié avait la qualité de cadre dirigeant d’en apporter la preuve.

Cassation sociale, 5 mars 2025, n° 23-23340

Déduction fiscale des cadeaux offerts aux clients

Résumé : Cette année, pour les fêtes de Noël, je souhaite offrir une bouteille de champagne à mes principaux clients. Ces cadeaux seront-ils déductibles du résultat imposable de mon entreprise ?

Oui, les cadeaux d’affaires constituent une charge déductible du résultat. Mais attention, leur prix doit être raisonnable et ils doivent être offerts dans l’intérêt direct de votre entreprise. À ce titre, vous devez être en mesure d’établir l’utilité de ces cadeaux pour votre activité (fidéliser un client, par exemple) et, en particulier, de désigner les bénéficiaires. Veillez donc à bien conserver tous les justificatifs nécessaires, notamment les factures ainsi que le nom des clients concernés.

Quand un directeur commercial peut-il être considéré comme un dirigeant de fait ?

Résumé : Faute d’avoir commis des actes concrets caractérisant son immixtion dans la direction de la société, le directeur commercial d’une SARL n’a pas pu être considéré comme en étant le gérant de fait.

Lorsqu’une personne, souvent un salarié ou un associé, accomplit des actes de direction et de gestion d’une société alors qu’elle n’a pas été désignée en qualité de dirigeant de droit (gérant dans une SARL, président dans une SAS…) de cette société, elle peut être considérée comme en étant le « dirigeant de fait ». Et du coup, elle peut subir les mêmes conséquences que si elle était dirigeant de droit. Sa responsabilité civile, financière ou pénale peut donc être engagée en cas de faute ou d’infraction.

Mais pour être considéré comme dirigeant de fait, l’intéressé doit s’être immiscé activement dans la direction de la société en ayant commis des actes positifs de gestion.

C’est ce que la Cour de cassation a rappelé dans l’affaire récente suivante. Après qu’une SARL avait été placée en liquidation judiciaire, une cour d’appel avait prononcé la faillite personnelle de son directeur commercial, salarié de la société, considérant qu’il s’était comporté comme son dirigeant de fait. En effet, elle avait constaté que l’intéressé avait, de tout temps, outrepassé ses fonctions de manière continue et régulière et qu’il avait exercé une emprise certaine sur le gérant (de droit) de la société, en l’occurrence son neveu. De plus, selon les salariés, le directeur commercial était le véritable dirigeant de la société car c’est lui qui prenait l’ensemble des décisions. Pour la cour d’appel, ces éléments constituaient un faisceau d’indices qui caractérisait l’exercice par ce dernier d’un véritable pouvoir de direction de la société, exercé en toute liberté et indépendance.

Des actes positifs précis d’immixtion dans la direction de la société

Mais la Cour de cassation, saisie par le directeur commercial, a censuré la décision de la cour d’appel. En effet, elle a affirmé qu’un faisceau d’indices ne peut suffire à démontrer une direction de fait. Et que des actes positifs précis, accomplis en toute indépendance, de nature à caractériser l’immixtion de l’intéressé dans la direction de la société doivent être établis, ce qui n’avait pas été le cas dans cette affaire.

Cassation commerciale, 26 mars 2025, n° 24-11190

Devoir de mise en garde de la banque à l’égard d’une caution « non avertie »

Résumé : Lorsque, compte tenu de ses qualités et de ses fonctions, la personne qui se porte caution auprès d’une banque est considérée comme « avertie », la banque n’est pas tenue à un devoir de mise en garde envers elle.

Lorsqu’une personne physique se porte caution, par exemple pour une société en contrepartie de l’octroi d’un crédit, la banque est tenue à un devoir de mise en garde à son égard.

Ce devoir de mise en garde a d’ailleurs évolué avec le temps. Avant 2022, la banque devait mettre en garde la caution lorsqu’elle était « non avertie » et que son engagement en tant que caution n’était pas adapté à ses capacités financières ou lorsqu’il existait pour elle un risque d’endettement né de l’octroi du prêt, résultant de l’inadaptation de ce prêt aux capacités financières de l’emprunteur.

À ce titre, dans une affaire récente, une personne s’était portée caution, en 2013, auprès d’une banque, pour la société dans laquelle elle était associée en contrepartie d’un prêt octroyé à cette dernière. Lorsque la société avait été placée en liquidation judiciaire, la banque avait agi contre la caution pour obtenir le paiement des échéances impayées. Pour échapper à son engagement, la caution avait alors reproché à la banque un manquement à son devoir de mise en garde.

Une caution « avertie »

Mais les juges ont estimé que la banque n’était pas tenue à un devoir de mise en garde envers cette personne car elle était « avertie ». En effet, elle était associée de la société ayant souscrit l’emprunt et présidente d’une autre société qui avait elle-même dirigé à plusieurs reprises la société emprunteuse. Aux yeux des juges, elle avait donc une certaine compétence puisqu’elle était impliquée dans la vie de la société en tant qu’associée et connaissait la vie des affaires.

Précision :
le droit actuellement applicable, plus précisément aux cautionnements souscrits à compter du 1 janvier 2022, prévoit que la banque est tenue de mettre en garde la personne physique qui se porte caution lorsque l’engagement du débiteur principal (celui qui souscrit le prêt) est inadapté à ses capacités. Toutes les cautions, qu’elles soient « averties » ou non, bénéficient donc de cette règle.

Cassation commerciale, 12 février 2025, n° 23-13899

Invalidité d’un salarié et inaptitude à occuper son emploi

Résumé : L’un de nos salariés vient de nous informer qu’il a été reconnu invalide par la Caisse primaire d’assurance maladie. Devons-nous considérer qu’il est inapte à occuper son emploi ?

Pas du tout. La reconnaissance par l’Assurance maladie de l’invalidité de votre salarié n’équivaut pas à une inaptitude à exercer son emploi. En effet, seul le médecin du travail peut, à l’issue notamment d’un examen médical, d’une étude du poste du salarié et d’un échange avec vous, le déclarer inapte à occuper son poste.

Si tel est le cas, vous devrez rechercher un emploi de reclassement correspondant à ses capacités. Et ce n’est qu’à défaut de poste disponible dans votre entreprise ou, le cas échéant, dans le groupe auquel elle appartient, ou bien en cas de refus du salarié des offres de reclassement que vous lui aurez proposées, que vous pourrez procéder à son licenciement pour inaptitude.

Exceptions :
vous êtes dispensé de l’obligation de rechercher un poste de reclassement si le médecin du travail indique expressément dans son avis d’inaptitude que « tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé » ou que « l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».