Cession du bail rural : précisions sur l’obligation d’exploiter

Résumé : Lorsqu’il obtient l’autorisation de céder son bail rural à son fils, un exploitant agricole n’est pas tenu de procéder immédiatement à cette cession dès lors que son bail n’est pas arrivé à échéance.

Vous le savez : un exploitant agricole est en droit de céder son bail rural au profit d’un de ses descendants (enfants, petits-enfants) ayant atteint l’âge de la majorité ou de son conjoint (ou de son partenaire de Pacs) à condition que ce dernier participe à l’exploitation des parcelles louées.

Précision :
la cession du bail ne peut être réalisée qu’avec l’agrément préalable du bailleur. À défaut d’accord de celui-ci, l’autorisation peut être accordée par le tribunal paritaire des baux ruraux. Et attention, l’exploitant qui procède à une cession de bail sans l’accord préalable du bailleur ou l’autorisation du tribunal encourt la résiliation de son bail ou, à tout le moins, le refus de son renouvellement par le bailleur.

Une fois la cession réalisée à son profit, le cessionnaire du bail devient tenu des obligations de ce bail et donc d’entretenir et d’exploiter le fonds loué. En revanche, il n’a pas l’obligation d’exploiter aussitôt après que l’autorisation de céder le bail a été obtenue.

Pas d’obligation immédiate d’exploiter

C’est ce que les juges ont précisé dans l’affaire récente suivante. En janvier 2019, un exploitant agricole avait définitivement (plus aucun recours possible) obtenu du tribunal l’autorisation de céder son bail rural à son fils. Mais ce n’est qu’en mars 2020 qu’il avait procédé effectivement à la cession. C’est donc à partir de cette date que son fils avait commencé à exploiter les parcelles considérées. Or quelque temps plus tard, le bailleur avait demandé en justice la résiliation du bail au motif que le fils du locataire n’avait pas exploité personnellement ces parcelles à compter du mois de janvier 2019.

Il n’a pas obtenu gain de cause, les juges ayant affirmé que l’obtention par le locataire en place de l’autorisation de céder son bail à son fils n’emportait pas obligation de le faire immédiatement, dès lors que son bail n’était pas arrivé à échéance (prévue en septembre 2025).

Cassation civile 3e, 22 mai 2025, n° 24-10141

Arrêt de travail : les salariés peuvent reporter leurs congés payés !

Résumé : Selon les juges, les salariés en arrêt de travail durant leurs congés payés ont droit au report de ces jours de congés, quelle que soit la date à laquelle débute cet arrêt. Et ce dès lors que l’avis d’arrêt est adressé à l’employeur.

Tous les salariés, quel que soit leur contrat de travail, bénéficient de jours de repos, autrement dit de congés payés (30 jours ouvrables par an, en principe). Mais que se passe-t-il lorsque les salariés sont en arrêt de travail pendant ces congés ?

Pour les juges, le salarié dont l’arrêt de travail débute avant son départ en vacances peut reporter ses jours de congés payés.

Mais jusqu’à présent, les juges considéraient que ce report ne s’imposait pas à l’employeur lorsque l’arrêt de travail du salarié était prescrit durant ses congés payés. Une règle qui, désormais, n’est plus de mise, les juges ayant pris position conformément au droit européen.

À noter :
dans le cadre d’une procédure d’infraction mise en œuvre par la commission européenne, la France avait, en juin dernier, été mise en demeure de s’expliquer et de remédier aux manquements au droit européen en matière de congés payés.

Un droit au report des congés payés

Dans une affaire récente, une salariée engagée en tant que médecin du travail avait, à la suite de son départ à la retraite, saisi la justice afin d’obtenir diverses indemnités de son ancien employeur. Et dans le cadre de ce litige, la question du solde des congés payés de la salariée « faisait débat ». En effet, l’employeur estimait que les jours de congés payés qui avaient coïncidé avec des jours d’arrêt de travail pour maladie devait être décomptés du solde des congés de la salariée.

Amenées à se prononcer dans ce litige, la Cour d’appel de Paris et la Cour de cassation ont donné tort à l’employeur. Pour les juges, désormais, le salarié qui se voit prescrire un arrêt de travail alors qu’il est déjà en vacances bénéficie ultérieurement des jours de congés payés qui coïncident avec les jours d’arrêt maladie.

Le droit au report des congés payés des salariés en arrêt de travail s’impose donc dorénavant aux employeurs, que cet arrêt débute avant ou pendant les congés payés. Mais à condition, bien entendu, que cet arrêt de travail soit notifié à l’employeur…

Précision :
les juges adaptent ainsi le droit français au droit européen (directive 2003/88/CE) qui garantit le droit au repos, à la santé et à la sécurité des salariés ainsi qu’à la position de la Cour de justice de l’Union européenne qui estime que le droit au congé annuel payé permet au travailleur de se reposer et de disposer d’une période de détente et de loisirs alors qu’un arrêt de travail permet au salarié de se rétablir d’une maladie.

Des questions en suspens

Si la nouvelle règle formulée par la Cour se cassation est aisée à comprendre, elle suscite toutefois certaines interrogations quant à son application pratique :
– le report des jours de congés fera-t-il l’objet de règles spécifiques ?
– comment traiter en paie les jours d’arrêt de travail qui coïncident avec des jours de congés payés ?
– cette nouvelle règle sera-t-elle dotée d’un effet rétroactif ?
À suivre donc.

Cassation sociale, 10 septembre 2025, n° 23-22732

Une SCI qui souscrit un emprunt pour acheter un immeuble est-elle un professionnel ?

Résumé : Une société civile immobilière (SCI) qui souscrit un prêt pour financer l’acquisition d’un bien immobilier conformément à son objet agit en qualité de professionnel et ne peut donc pas bénéficier de la réglementation sur les clauses abusives.

La loi protège les consommateurs et les non-professionnels contre les pratiques abusives auxquelles peuvent parfois s’adonner certains professionnels. Sachant qu’est considérée comme un consommateur, au sens du Code de la consommation, toute personne physique qui agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole. Et qu’est un non-professionnel toute personne morale n’agissant pas à des fins professionnelles.

À ce titre, dans une affaire récente, les juges ont affirmé qu’une société civile immobilière (SCI) qui souscrit des prêts immobiliers en vue de financer l’achat de biens immobiliers conformément à son objet social agit en qualité de professionnel.

Dans cette affaire, une SCI avait souscrit trois prêts immobiliers, libellés en francs suisses et remboursables dans cette devise, pour financer l’acquisition d’une maison d’habitation située en France et la réalisation de travaux dans cette maison. Par la suite, elle avait demandé en justice l’annulation des clauses de remboursement en devises suisses, considérées comme abusives.

Rappel :
sont abusives, dans les contrats conclus entre un professionnel et un consommateur ou un non-professionnel, les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Mais la Cour de cassation ne lui a pas donné gain de cause. Car pour les juges, ayant agi à des fins professionnelles, la SCI ne pouvait pas se prévaloir des dispositions du Code de la consommation relatives au caractère abusif de certaines clauses des contrats de prêt.

Cassation civile 1re, 9 juillet 2025, n° 23-23066

Abus de majorité : contre qui l’action en justice doit-elle être intentée ?

Résumé : Lorsqu’ils s’estiment victimes d’un abus de majorité, les associés minoritaires d’une société doivent agir contre la société seulement dès lors qu’ils se bornent à demander l’annulation de la décision.

Dans une société, lorsque les associés majoritaires prennent une décision contraire à l’intérêt de celle-ci et dans l’unique but de les favoriser au détriment des associés minoritaires, cette décision constitue un abus de majorité. Dans ce cas, ces derniers peuvent demander l’annulation de la décision et/ou des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi.

Exemples :
a, par exemple, été considérée comme constitutive d’un abus de majorité la décision d’octroyer aux dirigeants une prime correspondant à plusieurs fois le montant des bénéfices sociaux alors que ceux-ci avaient été mis en réserve pendant plusieurs exercices sans politique d’investissement corrélative. Idem pour la décision de mettre en réserve des bénéfices d’une SARL, alors qu’elle ne pouvait pas être tenue pour une mesure de prudence dans un contexte économique difficile dès lors que le faible montant des bénéfices était le résultat de l’augmentation de sa rémunération par le gérant majoritaire.

Agir contre la société ou contre les associés majoritaires ?

À ce titre, la Cour de cassation vient de préciser que si les associés minoritaires se bornent à demander l’annulation de la décision (donc pas d’indemnisation), ils peuvent intenter leur action contre la seule société, sans avoir à agir contre les associés majoritaires.

Précision :
à l’inverse, les juges ont indiqué par le passé que si les associés minoritaires victimes d’un abus de majorité engagent une action afin d’obtenir des dommages-intérêts, cette action doit être intentée contre les associés majoritaires car ce sont eux qui ont commis la faute ouvrant droit à réparation du préjudice subi. Du coup, si l’action des associés minoritaires vise à demander à la fois l’annulation de la décision et l’octroi de dommages-intérêts, elle doit être intentée à la fois contre la société et contre les associés majoritaires.

Cassation commerciale, 9 juillet 2025, n° 23-23484

Un pas de plus vers la facturation électronique

Résumé : Un service de consultation en ligne de l’annuaire dédié à la facturation électronique vient d’être mis à disposition des entreprises.

Vous le savez, le passage à la facturation électronique interviendra dès le 1er septembre 2026. En effet, à compter de cette date, toutes les entreprises établies en France et assujetties à la TVA, quelle que soit leur taille, devront pouvoir recevoir des factures électroniques. En outre, à cette même date, l’obligation d’émettre des factures électroniques et celle de transmettre les données de transaction et/ou de paiement (e-reporting) s’appliqueront aux grandes entreprises et à celles de taille intermédiaire.

À savoir :
les PME et les micro-entreprises devront, quant à elles, émettre des factures électroniques et effectuer l’e-reporting à compter du 1 septembre 2027.

Ces factures électroniques vont transiter entre les émetteurs et les destinataires par l’intermédiaire de leur plate-forme agréée (ex-plate-forme de dématérialisation partenaire (ex-PDP)) respectives. Les PA se chargeront aussi d’extraire les données utiles à l’administration fiscale et de les lui envoyer sur sa plate-forme, pour l’heure baptisée « portail public de facturation » (PPF). Outre la concentration et la transmission des données, le PPF assurera également la gestion de l’annuaire central des entreprises.

Une mise à jour de l’annuaire

À ce titre, la Direction générale des Finances Publiques (DGFiP) et l’Agence pour l’informatique financière de l’État (AIFE) ont annoncé la mise à disposition d’un service de consultation en ligne de cet annuaire, permettant de vérifier les entreprises concernées par la réforme, d’identifier leur PA et de connaître leur adresse électronique de facturation. Actuellement, près de 80 PA se sont raccordées à l’annuaire pour mettre à jour les adresses de facturation de leurs clients. Les entreprises peuvent, dès à présent, vérifier leur situation. Pour rappel, chaque entreprise devra avoir choisi une PA dès le 1er septembre 2026 !

En pratique :
la PA de l’entreprise émettrice de la facture se connectera à l’annuaire central pour identifier la PA de l’entreprise destinataire. Ce sont donc les informations contenues dans l’annuaire qui permettront la fiabilité de l’acheminement des factures électroniques.

Une phase pilote à partir de février 2026

En février 2026, une phase pilote devrait être lancée, permettant aux entreprises de tester la facturation électronique en conditions réelles, sans encourir le risque d’être sanctionnées.

www.impots.gouv.fr, actualité du 18 septembre 2025

L’Urssaf organise une campagne de régularisation de l’activité de loueurs de meublés

Résumé : L’Urssaf invite certains propriétaires bailleurs à régulariser leur situation. Enregistrement, choix du statut social, paiement de cotisations… Cette campagne cible les loueurs de meublés touristiques dont les revenus locatifs dépassent 23 000 € par an.

Depuis quelques semaines, l’Urssaf adresse un questionnaire à certains propriétaires exerçant une activité de loueurs de meublés de courte durée. L’objectif étant de les inciter à régulariser volontairement leur situation auprès de l’Urssaf dès lors que leur revenu locatif dépasse le seuil annuel de 23 000 €, qu’ils soient loueur de meublés non professionnel (LMNP) ou professionnel (LMP).

Précision :
cette campagne est réalisée sur la base des informations transmises par les opérateurs de plates-formes numériques (Airbnb, Abritel, Leboncoin…) à l’administration fiscale que cette dernière communique à l’Urssaf.

Rappelons qu’à partir de ce seuil de 23 000 €, les revenus de cette activité non salariée présentent un caractère professionnel et doivent être déclarés. Des cotisations sociales peuvent alors être dues. En fonction du montant des recettes, le bailleur a la possibilité de choisir son statut social :
– si les recettes annuelles en 2024 sont comprises entre 23 000 € et 77 700 €, il peut opter soit pour le statut du régime général, soit pour celui de micro-entrepreneur, soit encore pour celui de travailleur indépendant ;
– si les recettes annuelles en 2024 sont supérieures à 77 700 €, il doit adopter le statut de travailleur indépendant.

À noter :
dès lors que les recettes annuelles en 2024 n’excèdent pas 23 000 €, les revenus de cette activité relèvent de la gestion du patrimoine privé et ne donnent pas lieu au paiement de cotisations sociales. Le bailleur doit néanmoins déclarer ses recettes à l’administration fiscale lors de sa déclaration de revenus.

Local commercial impropre à son usage et refus de paiement du loyer

Résumé : Le locataire qui, en invoquant « l’exception d’inexécution », refuse de payer le loyer au motif que le local commercial est devenu impropre à son usage n’a pas à envoyer au bailleur une mise en demeure préalable.

Dans le cadre d’un contrat dans lequel chacune des parties s’engage à réaliser des prestations l’une envers l’autre, une partie peut refuser d’exécuter son obligation lorsque l’autre partie n’exécute pas la sienne dès lors que cette inexécution est suffisamment grave. On parle « d’exception d’inexécution ».

Ainsi, par exemple, dans un contrat de vente, l’acheteur est en droit de refuser de payer le prix tant que le vendeur ne lui a pas livré le bien. De même, dans un contrat de bail, il est admis que le locataire puisse refuser de payer le loyer lorsque le bailleur manque à son obligation de délivrer un local conforme à l’usage auquel il est destiné.

À ce titre, les juges viennent de réaffirmer que le locataire peut se prévaloir d’une exception d’inexécution pour refuser, à compter du jour où les locaux sont, en raison du manquement du bailleur à ses obligations, devenus impropres à l’usage auquel ils étaient destinés, de payer les loyers sans être tenu de délivrer une mise en demeure préalable à ce dernier.

Dans cette affaire, une société locataire avait cessé de payer les loyers en raison d’importantes infiltrations dans le local commercial. À l’appui de sa décision de refuser de payer les loyers, il avait invoqué l’exception d’inexécution. En effet, selon lui, le bailleur avait manqué à son obligation de délivrance puisque le local était devenu impropre à l’usage auquel il était destiné et qu’il ne pouvait plus exploiter son activité commerciale tant que des travaux ne seraient pas réalisés.

Le bailleur avait alors reproché à son locataire de ne pas lui avoir envoyé de mise en demeure préalablement à la cessation du paiement des loyers, ce qui l’empêchait de se prévaloir d’une exception d’inexécution.

Pas besoin d’une mise en demeure

Mais les juges ont donné raison au locataire. En effet, ils ont rappelé que le locataire peut refuser de payer le loyer à compter du jour où le local devient impropre à son usage en raison du manquement du bailleur à ses obligations. Et que cette exception d’inexécution joue sans avoir à envoyer une mise en demeure préalable.

Cassation civile 3e, 18 septembre 2025, n° 23-24005

Une enquête sur la santé financière des associations

Résumé : Après une première enquête sur la santé financière des associations menée en début d’année, Le Mouvement associatif lance une seconde enquête sur ce sujet afin de mesurer l’évolution de la situation des associations.

En mars 2025, Le Mouvement associatif publiait les résultats de son enquête sur la santé financière des associations.

Il en ressortait qu’en ce début d’année, plus de la moitié des associations employeuses rencontraient des problèmes de trésorerie (23 % de manière récurrente et 31 % de manière ponctuelle). Près du tiers des associations employeuses (31 %) disposant de moins de 3 mois de réserve.

Face à cette situation, et au vu de la conjoncture, 18 % des associations employeuses ne remplaçaient pas les départs définitifs de leurs salariés et 16 % annulaient ou reportaient leurs recrutements.

Une seconde enquête

En ce début d’automne, les responsables associatifs sont invités à répondre à une nouvelle enquête sur la santé financière de leur structure. Un moyen pour Le Mouvement associatif et le Réseau national des Maisons des associations d’évaluer sur ces derniers mois l’évolution de la situation financière et économique des associations.

À savoir :
cette enquête, d’une durée de 15 minutes, s’adresse à toutes les associations quelles que soient leur taille et leur activité et qu’elles aient répondu ou non à la première enquête.

Contrôle d’une comptabilité informatisée : gare au délai pour réaliser les traitements !

Résumé : L’administration fiscale doit laisser un délai « suffisant » à l’entreprise qui choisit de réaliser elle-même les traitements informatiques nécessaires à une vérification de sa comptabilité informatisée.

Si votre entreprise tient une comptabilité informatisée et qu’elle fait l’objet d’une vérification, elle doit remettre à l’administration fiscale une copie des fichiers des écritures comptables (FEC), sous forme dématérialisée, dès le début des opérations de contrôle.

Le plus souvent, la réalisation de la vérification de comptabilité nécessite la mise en œuvre de traitements informatiques. L’entreprise doit alors choisir entre un traitement :
– par le vérificateur sur le matériel de l’entreprise ;
– par l’entreprise elle-même sur son propre matériel ;
– ou par le vérificateur, hors des locaux de l’entreprise, au moyen de copies fournies sur support informatique par l’entreprise.

Lorsque l’entreprise choisit d’effectuer elle-même les traitements, l’administration doit lui préciser par écrit les travaux à réaliser ainsi que le délai accordé pour les accomplir.

À noter :
vous pouvez changer d’option jusqu’à l’expiration du délai fixé par l’administration pour réaliser les traitements et demander que ces derniers soient effectués par le vérificateur.

À ce titre, la question s’est posée en justice de savoir quel devait être le délai accordé par l’administration à l’entreprise pour réaliser ces traitements.

Un délai « suffisant », vient de répondre le Conseil d’État, dont l’appréciation relève du cas par cas.

Illustration

Dans cette affaire, une société avait choisi, le 20 avril, de procéder elle-même aux traitements informatiques nécessaires à la vérification dont elle faisait l’objet. L’administration lui avait transmis, par un courrier du 27 avril, les modalités de mise en œuvre de ces traitements, dont les résultats étaient attendus au plus tard le 17 mai, en l’informant que si tout ou partie des travaux soulevaient une difficulté de réalisation, elle était invitée à en faire connaître rapidement les raisons.

Ce délai a été jugé suffisant par le Conseil d’État. À l’appui de leur décision, les juges ont relevé, d’une part, que les résultats des traitements, bien que reçus par le vérificateur le 9 juin, donc au-delà du délai prescrit, avaient été pris en considération. D’autre part, que la société n’avait fait part d’aucune difficulté particulière dans la mise en œuvre des travaux. Et enfin, que par courrier du 22 juin, le vérificateur lui avait demandé de compléter ses réponses.

Attention :
ce délai peut donc être plus ou moins long, selon les cas. Un élément à ne pas négliger lors du choix de l’option de réalisation des traitements informatiques.

Conseil d’État, 15 mai 2025, n° 494887

Quant au droit de se taire lors d’un entretien préalable au licenciement

Résumé : L’employeur n’est pas tenu d’informer le salarié de son droit de se taire au cours d’un entretien préalable au licenciement.

L’employeur qui envisage de licencier un salarié ou de recourir à une sanction disciplinaire doit, en principe, le convoquer à un entretien préalable. Un entretien durant lequel l’employeur fait état des motifs qui le poussent à considérer une telle mesure et recueille les explications du salarié. Mais cette procédure obéit à certaines règles ! Ainsi, par exemple, (ne s’applique pas pour les sanctions disciplinaires) la lettre de convocation doit mentionner l’objet de l’entretien ainsi que la possibilité donnée au salarié de se faire assister (autre salarié de l’entreprise, conseiller extérieur…). Et récemment, le Conseil constitutionnel a dû répondre à la question suivante : l’employeur est-il tenu d’informer le salarié de son droit de se taire lors d’un entretien préalable ?

Pas d’obligation d’information !

Le Conseil d’État et la Cour de cassation ont récemment saisi le Conseil constitutionnel d’une question prioritaire de constitutionnalité : les règles du Code du travail relatives à l’entretien préalable, qui ne prévoient pas d’information du salarié sur son droit de se taire durant l’entretien, sont-elles inconstitutionnelles ? Et ce, au motif qu’elles méconnaîtraient le principe constitutionnel selon lequel « nul n’est tenu de s’accuser, dont découle le droit de se taire ».

Mais pour le Conseil constitutionnel, ce principe ne s’applique que dans le cadre d’une sanction ayant un caractère de punition traduisant l’exercice de prérogatives de puissance publique. Il n’est pas de mise dans une relation de droit privé, telle que la relation qui existe entre un employeur et un salarié.

En conséquence, les règles du Code du travail liées à l’entretien préalable ne sont pas inconstitutionnelles. Et les employeurs ne sont pas tenus d’informer leurs salariés de leur droit de se taire au cours d’un entretien préalable.

Conseil constitutionnel, QPC du 19 septembre 2025, décision n° 2025-1160/1161/1162